1)- Pour répondre à l’analyse qui précède et pour remplir les fonctions traditionnelles d’un parti ,
ce parti devrait être :
un parti ouvert, ne fonctionnant pas sur le modèle d’un parti au militantisme étriqué et coupé de la société,
un parti bien organisé, efficace, mais ne concentrant pas l’essentiel de ses efforts et de son énergie sur l’exercice des fonctions d’une machine électorale et d’un appareil au service d’élus locaux.
un parti capable de définir des nouvelles formes d’engagement et de militantisme ainsi que des modes d’organisation permettant de toucher les catégories populaires (quartiers, monde ouvrier…) et d’assurer l’émergence de cadres politiques issus de leurs rangs
un parti où l’on retrouve la fraternité qui doit accompagner le combat politique (temps festifs, dimension culturelle de notre combat)
un parti dont l’image est attrayante, parce qu’il répond aux motivations de l’adhérent potentiel, à savoir :
– manifester son soutien à une organisation dont il se sent proche, lui communiquer des informations en provenance de la « société civile » et participer à ses réflexions et ses actions ;
– y voir clair dans la masse des informations politiques, économiques et sociales véhiculées par les médias ;
– exercer un mandat électoral ;
– participer au changement de la société, en articulant action syndicale, associative, voire professionnelle avec des valeurs et un projet politique ;
– trouver un relais collectif à des initiatives individuelles ;
– agir dans une ambiance conviviale.
un parti qui mène des combats pour l’hégémonie culturelle face à la droite, qui respire avec la société, qui consulte, qui noue des partenariats, qui soutient des initiatives avec les forces de changements (ONG, associations, syndicats…)
un parti internationaliste, qui mobilise ses militants dans les instances progressistes mondiales. Avant chaque congrès de ces instances, le parti devrait préparer son intervention par un texte d’orientation qui devra être soumis au vote des militants. Une journée annuelle de la solidarité internationale pourrait être organisée tant au niveau national que local (fête, mise en valeur des initiatives de coopération décentralisée, débats sur le monde, invitation de partis amis…). L’action des parlementaires européens donnera lieu à des comptes-rendus réguliers, suivis de débats.
2)- Le recrutement
Etre un vrai « parti de masse » est une nécessité pour un parti qui veut se trouver en cohérence avec son électorat. Cela implique, même s’il ne s’agit pas la seule caractéristique d’un parti de masse, que son recrutement soit large et diversifié, notamment dans les origines sociologiques.
Les campagnes de recrutement doivent être périodiques et gérées avec efficacité (ciblage, évaluation..).
L’accueil des nouveaux adhérents, ni sectaire, ni banal, doit être ouvert, convivial, pédagogique. Un effort particulier doit être fait pour assurer l’adhésion de militants réellement issus des couches populaires.
Le niveau de cotisation ne doit pas être dissuasif, mais modulé en fonction des revenus. On peut aussi envisager des cotisations « préférentielles » pour les syndicalistes (ou les membres d’autres organisations de masse), pour les membres d’une même famille….
Le sympathisant doit avoir un statut clairement défini. Il faut considérer que sa position est transitoire et qu’il ne se trouve pas dans un état stable et finalement ambigu, qui ferait croire que l’adhésion serait un « saut » gigantesque dans la politique et que les militants perdraient leur liberté, leur autonomie en rejoignant un parti. L’instauration d’une « adhésion temporaire » leur permettrait d’adhérer pendant une période limitée (1 an ou 2 ans) sans payer de cotisation, mais sans droit de vote. Cet engagement limité les autoriserait à participer aux débats. A la fin de la période, l’adhésion partirait du premier jour.
3)- L’organisation
– L’organisation territoriale (les fédérations et les sections) doit assurer un réel brassage social.
– Les courants de pensée
A l’image des partis et de la démocratie, ils présentent beaucoup d’inconvénients, mais ils demeurent la meilleure méthode pour assurer le pluralisme, grâce à la représentation proportionnelle, qui est la seule garantie du respect des minorités et du libre choix de chacun.
Sans la proportionnelle, il n’y a pas de rassemblement possible de toute la gauche.
Les courants de pensée doivent demeurer liés au dépôt de motions au niveau national (pas de courants locaux, départementaux ou régionaux).
– Les secteurs thématiques :
Chaque adhérent devrait pouvoir adhérer d’une part à sa section territoriale, mais aussi à un secteur thématique (l’Education, la Culture, l’Urbanisme et la Ville, les entreprises, différents secteurs industriels ou d’activité économique….)
Ces structures, qui représentent un changement dans les formes de militantisme, devraient :
préparer des propositions pour les programmes, suivre l’évolution de la situation ;
organiser l’opposition à la politique de droite ;
relayer l’action de la gauche au pouvoir, mais aussi la regarder avec lucidité et esprit critique pour aider à la réorienter si besoin ;
développer une vision anticipatrice et prendre des initiatives innovantes ;
renforcer l’influence de la gauche dans différents milieux .
En lien étroit avec des organismes associés, ces secteurs permettront de démultiplier les formes de militantisme, solliciteront des expertises, des expériences, des engagements trop souvent négligés dans les partis et valoriseront d’autres cadres politiques que les élus. Ils assureront une vitalité nouvelle et la présence de la gauche dans la société.
A chaque congrès, les secteurs éliront leurs responsables et leurs représentants dans les instances nationales.
– Les instances dirigeantes
Au niveau national, un comité directeur comprendra 3 collèges représentant les courants, les fédérations et les secteurs thématiques (par exemple, respectivement: 50%, 20%, 30%).
Pour éviter les confrontations de légitimité, le 1er secrétaire national et les 1ers secrétaires fédéraux ne doivent pas être élus par les militants, mais par les instances issues du Congrès. Ils doivent avoir le souci permanent de rapprocher les points de vue (en délimitant bien les divergences à ce qui est réellement nécessaire) et de rassembler.
– Les élus
Leurs droits et leurs devoirs doivent être clarifiés, pour qu’on ne parle pas de « parti d’élus ou d’éligibles ». Afin de développer une solidarité interne, les élus pourraient contribuer à mettre en place dans chaque fédération une « cellule conseils », qui aiderait les adhérents en difficulté.
Pour la désignation des candidats aux élections, les sympathisants qui ont au moins un an d’ancienneté peuvent voter s’ils concrétisent leur adhésion (voir ci-dessus point 2).
Le non cumul doit être la règle (en particulier entre les responsabilités internes et externes).
Il sera nécessaire de trouver des réponses aux difficultés de « sortie » de la fonction d’élu.
4)- La réflexion interne
La réflexion doit être le fruit de la synthèse entre le travail des commissions d’experts et celui des militants et des sympathisants. Ce dernier pourrait s’organiser à partir de forums :
– au niveau national, 5 à 6 forums traiteraient chaque année de thèmes tels que : écologie, logement, éducation, entreprises/droit du travail/syndicalisme, solidarité internationale…..
– au niveau départemental, 2 forums annuels (associant militants et sympathisants) seraient obligatoirement organisés, autour de thèmes choisis parmi les thèmes des forums nationaux.
Il faudra définir des règles d’arbitrage politique sur le fond (méthode, temps, forme)
5)- Les relations externes
Les structures associées. Dans de nombreux domaines, le parti devrait créer (ou soutenir) des organismes associés, afin de disposer de relais et de soutenir les initiatives de ses militants et sympathisants. Exemples de domaines possibles :
– humanitaire
– aide aux élus (dossiers techniques, conseils…)
– boutiques de droit
– comités de vigilance (défense des libertés publiques …)
– clubs de réflexion sur des sujets spécifiques
Les modalités du lien avec le syndicalisme et le monde associatif devront être clairement précisées, pour éviter les ambiguïtés ou les conflits.
6)- La formation, le rayonnement idéologique
La gauche ne pourra pas durablement faire l’économie des débats idéologiques et ne doit pas négliger la bataille des valeurs et des idées. Cette réflexion doit s’appuyer sur l’analyse du réel et s’inscrire dans l’histoire.
Un parti de gauche a le devoir d’assurer à tous ses militants une formation, qui ne peut être monolithique, car la pensée de la gauche s’est toujours nourrie de la diversité de ses analyses.
C’est pourquoi :
Les courants de pensée devront s’engager dans un véritable travail de synthèse (qui n’a rien à voir avec le compromis mou), car la juxtaposition de points de vue qui cohabitent plus qu’ils n’échangent devient totalement stérilisante. Un centre d‘études et de recherche sera chargé de rendre accessible à tous la formulation des choix stratégiques et culturels majeurs, ce qui permettra d’éclairer les arbitrages.
La réconciliation entre socialistes et communistes et l’apport plus récent des Verts rendront possible la création d’un centre sur l’histoire de la gauche et de ses idées. Ainsi, chacun sera assuré de la prise en compte de son histoire, de son apport à la gauche, sans craindre l’esprit critique.
Dans le même esprit, une université populaire permanente aidera à développer la formation, le combat culturel, le soutien aux penseurs contestataires, le débat pluraliste permanent. Les moyens interactifs de communication seront sollicités. Une déclinaison régionale de cette université permettra de tisser de nouveaux liens entre la gauche et les intellectuels, ainsi qu’avec les fondations étrangères de gauche. Y seront invités des cadres des partis de gauche d’autres pays.